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Bruce FORSYTH

Bruce Forsyth

ILL, Symposium Francis Tasset (2009)
ILL en 2002

Ron Ghosh nous a informés du décès de Bruce Forsyth le 20 juillet 2023, à l'âge de 91 ans. Bruce était resté en forme jusqu'à la fin.

Il était physicien retraité (1997) du Rutherford Lab mais quelqu'un de marquant pour l'ILL car il y a fait l'essentiel de sa carrière de neutronicien spécialiste du magnétisme.
Dans les années 60, il a construit un diffractomètre à neutrons polarisés à Harwell. En collaboration avec Jane Brown et Philippe Ledebt, il l’installe à l’ILL en 1974 sur le faisceau thermique H5 sous le nom de D3. Il fait donc partie du petit groupe des pionniers qui, grâce aux instruments D5 et D3, a développé à l’ILL l'étude des monocristaux par diffraction des neutrons polarisés.
La bib de l'ILL recense plus de 60 articles à son nom, dont une bonne moitié avec Jane Brown comme co-auteur. C'est également avec elle qu'il a participé à l'aventure de la polarimétrie sphérique conduite par Francis Tasset et qui aboutira à la construction des fameux CRYOPADs.

Bon vivant et plein d'humour, il se présentait aux français bien peu anglophones des débuts comme "Brussse Forsiiite" en insistant bien sur le "ite". En 2018 il a gratifié l'ARILL d'un texte bien dans son style intitulé "Du temps perdu à la recherche".

Bruce Forsyth par Eddy Lelièvre-Berna

Bruce Forsyth, Valery Nuñez, Francis Tasset sur IN20 en 1990. Bruce est à côté du 1er CRYOPAD
Probablement photo prise par Jane Brown
Bruce Forsyth et Jane Brown sur D3, en train d’analyser les données collectées dans la nuit
©1998 Eddy Lelièvre Berna

Eddy Lelièvre-Berna, qui a bien connu Bruce, nous apporte son témoignage.

A ce qui précède, j’ajouterai que c'est lui et Jane Brown qui ont proposé d’utiliser un cristal de Heusler pour polariser les faisceaux de neutrons. Cette idée a été exploitée quelques années plus tard à Grenoble par le CEA puis l’ILL et cela aura été une avancée majeure pour la physique des neutrons polarisés.

Je confirme que Bruce a construit la première version de D3 à partir de composants développés à Harwell. Les mécaniques de la table échantillon et de la lyre du détecteur ont longtemps été utilisées et il en reste encore des pièces aujourd’hui. Bruce avait adopté un flipper radiofréquence qui était extrêmement difficile à régler et c’est ce qui a motivé Francis Tasset à le remplacer par le premier Cryoflipper.

En 1994,
avec Francis j’ai remonté D3 (version B) et, en 1995 et les années suivantes, Bruce et Jane nous ont rejoints pour les expériences. Bruce portait toujours un petit foulard autour du cou qui lui donnait un air très élégant. C’était un vrai gentleman avec une pointe d’humour inégalable. On ne passait que du bon temps avec lui.

Lors d’une expérience, nous avons rencontré un petit problème pour régler le Cryoflipper.
Un soir, nous étions tous les deux sur D3 et Bruce m’a proposé de faire une petite modification mécanique du système de fixation d’un nutateur, du genre bricolage amateur peu enclin à satisfaire le niveau d’exigence de Francis. J’ai hésité un instant puis démonté le nutateur et Bruce a bricolé. On a tout remonté et ça fonctionnait très bien. On n’a rien dit à Francis !

Bruce est venu très souvent à l'ILL faire des expériences avec Jane. En particulier, il a participé aux expériences avec le premier Cryopad sur IN20. Il était un grand supporter des projets de Francis et était avec nous au symposium de Francis en 2009.

À bientôt,
Eddy

Bruce Forsyth par Jane Brown

Traduction Alain Filhol  (Texte original en Anglais)

Bruce et moi nous sommes rencontrés pour la première fois en 1955 lorsqu'il a rejoint le groupe "alliages" du laboratoire de cristallographie du Cavendish Laboratory à Cambridge, en tant qu'étudiant-chercheur. Même si Bruce était mon aîné de quelques mois, il était d'un an mon cadet au laboratoire à cause des 18 mois qu'il avait passés à faire son service militaire dans la RAF. Nous avons tous les deux travaillé sur la détermination de la structure d'alliages d'aluminium, un projet parrainé par l'armée de l'air américaine.

Après avoir terminé son doctorat dans ce domaine, Bruce s'est tourné vers le Atomic Energy Research Establishment (AERE) à Harwell où il a été responsable de la construction, sur le réacteur Pluto, de leur premier (et unique) diffractomètre à neutrons polarisés. Il a été étroitement associé à la création du programme utilisateur de l'Université à Harwell et, pour soutenir les utilisateurs, il a finalement déménagé au laboratoire Rutherford Appleton lorsqu'un groupe de diffusion de neutrons y a été créé.

Lorsque les Britanniques rejoignirent les associés de l'ILL, Bruce s'est immédiatement impliqué dans le projet de déménagement vers l'ILL de trois diffractomètres qui avaient déjà été commandés pour le programme utilisateur. Il fut personnellement responsable de l'installation de l'un d'eux, qui devint le diffractomètre à neutrons polarisés D3 et, à cette occasion, sa famille et lui passèrent l'année 1974-75 à Grenoble.

Pendant les 15 années qui suivirent, il aura été un visiteur assidu de l'ILL et aura été étroitement impliqué dans de nombreuses expériences, sur D3 et d'autres instruments. Il aura été un collaborateur précieux dans de nombreuses expériences exploratoires avec l'analyse de polarisation et CRYOPAD.

On se souviendra de lui comme d'un bon ami et d'un proche collaborateur à la personnalité toujours enjouée et extravertie.

Archives Francis Tasset

Voici un texte de 1974, tiré des archives personnelles de Francis Tasset, qui évoque à la fois le D3 de Bruce Forsyth et les monochromateurs polarisants à base de cristaux de Heusler dont ce dernier a eu l'idée avec Jane Brown.

Le premier diffractomètre D3 à l'ILL

Dernière mise à jour: 18 August 2023